Pol Jules Beauquesne

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Just the two of us

« Pour moi, l'âge n'a pas d'importance. Depuis la nuit des temps, les hommes et les femmes s'aiment d'amour, quelque soit la différence. Il n'y a pas d'amour impossible. » (Philippe Labro.)

Septembre 2004.
Jardin des Tuileries. C'est ici que se retrouvent Pol et Bleuenn tous les samedi après-midi. C'est ici qu'ils se sont rencontrés, et c'est ici qu'ils continuent de se voir et apprennent à se connaitre.
« Mais tu sais j'ai pas toujours été canon, comme tu dis ... », disait aujourd'hui Pol d'une voix très sérieuse. « Nooon, je peux pas te croire là. » « Je te promets, j'étais petit et gros, j'avais des lunettes et j'étais passionné par les trains à vapeur ... » Bleuenn eut un rire moqueur. Son amoureux lui donna une petite tape sur le haut du crâne. « Rigole, rigole. Toi aussi t'avais une obsession bizarre je suis sure quand t'étais petite ! » Bleuenn s'arrêta brusquement de rire et Pol afficha un air triomphant. Elle se lança. « Bon. Quand j'avais huit ou neuf ans mes parents ont acheté une vieille maison qu'ils ont rénové. Du coup mon père avait souvent besoiner d'aller à Monsieur Bricolage ou Leroy Merlin et moi je l'accompagnais. Pendant qu'il achetait sa peinture et tout son matériel ... j'allais admirer les poignées de porte. » Ce fut au tour de Pol d'éclater de rire. « Mais c'était pas des poignées normales, c'était celles en forme de poisson et tout, t'en as déjà vu je suis sure! », se défendit Bleuenn. Ses paroles accentuèrent l'hilarité de Pol. « Oh, que t'es con », bougonna-t-elle. Pol, voyant que son amoureuse boudait à moitié, se calma un peu. « Fais pas la tronche Blue, je trouve ça juste trop mignon ! » Bleuenn ne se déridait toujours pas. Pol l'embrassa alors longuement, tendrement, amoureusement et après il eut enfin droit à un sourire.

Malgré leur différence d'âge qui aurait pu laisser croire qu'ils étaient frère et sœur, ça crevait les yeux que ces deux-là s'aimaient. À l'imparfait, oui, puisqu'aujourd'hui, les deux tourtereaux ne sont plus ensemble. C'était une décision de Pol. Mais ne lui demandez pas pourquoi il a eu l'idée saugrenue de quitter Bleuenn, parce que lui même ne sait pas encore exactement pourquoi. Il avait juste parfois l'impression de lui voler son enfance. Quand elle a eu quinze ans, il fêtait ses vingt ans. À quinze ans on est encore un peu un enfant, alors qu'à vingt on est déjà un adulte. Un adulte n'a pas les mêmes besoins qu'une adolescente, qui plus est ... Cette relation devenait trop malsaine pour Pol. Il s'en voulait chaque fois qu'il l'embrassait et plus elle grandissait, plus il se sentait monstrueux, il avait l'impression de profiter d'elle. Il pensait qu'elle serait mieux sans lui. Alors il est parti. Aujourd'hui ils ont tous les deux quelqu'un dans leur vie. Pol va se marier. Et Bleuenn s'est installée à New York avec son petit ami, persuadée qu'il n'y a plus aucune chance qu'un jour Pol revienne vers elle. La vérité est que ledit Pol ne peut s'empêcher de penser sept jours sur sept à Bleuenn, la fille qui s'extasiait devant des poignées de porte quand elle était petite. Il ne peut s'empêcher de penser à Bleuenn, la seule fille qu'il ait jamais aimée.